La Santé de la Planète : Intégrer la santé des écosystèmes dans les protocoles de santé publique


 

Les discussions sur la santé publique se concentrent traditionnellement sur les maladies humaines, leur prévention, et les infrastructures médicales. Pourtant, une perspective essentielle reste souvent négligée : la santé des écosystèmes qui nous soutiennent. Ce concept, appelé "Santé de la Planète", vise à intégrer des indicateurs environnementaux dans les politiques de santé publique, en reconnaissant que la santé humaine et celle de la Terre sont indissociables.

Des études récentes montrent que la dégradation des écosystèmes : pollution de l'air, appauvrissement des sols, contamination de l'eau, contribue directement à l'émergence de crises sanitaires majeures. Par exemple, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime que la pollution de l’air est responsable de 7 millions de décès prématurés chaque année. Les sols dégradés par les activités humaines perdent leur capacité à filtrer les toxines, augmentant ainsi le risque de contamination de l’eau potable.

Le lien entre la santé des écosystèmes et celle des populations est particulièrement visible dans les pandémies. Selon une étude menée par Daszak et al. (2020) pour Nature, environ 75 % des maladies infectieuses émergentes, telles que la COVID-19, sont d’origine zoonotique et résultent de la perturbation des écosystèmes naturels par l’homme.

Vers une redéfinition des protocoles de santé publique

L’idée novatrice de la "Santé de la Planète" propose que la santé des écosystèmes soit intégrée aux protocoles de santé publique, au même titre que les maladies infectieuses ou les carences nutritionnelles. Cela nécessite de :

  1. Mesurer la santé des écosystèmes : inclure la qualité des sols, de l’eau et de l’air dans les indicateurs mondiaux de santé publique.
  2. Créer des standards internationaux : l’OMS pourrait établir des critères spécifiques, en partenariat avec des organisations environnementales comme le PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement).
  3. Former des professionnels de santé environnementale : introduire des cursus universitaires dédiés à la compréhension des interactions entre santé humaine et santé écologique.

Un exemple marquant est l’initiative Planetary Health Alliance lancée par The Lancet et Harvard University, qui appelle à des actions globales pour préserver les écosystèmes comme condition préalable au bien-être humain.

Les forêts, souvent appelées les "poumons de la Terre", illustrent parfaitement cette interdépendance. Leur destruction entraîne une hausse des gaz à effet de serre, altère les cycles hydrologiques, et réduit la capacité des populations locales à accéder à des ressources vitales. En Indonésie, les feux de forêt massifs en 2015 ont non seulement émis autant de CO₂ que le Japon en un an, mais aussi provoqué des troubles respiratoires chez plus de 500 000 personnes.

De même, les zones humides, qui agissent comme des filtres naturels pour l'eau, subissent une destruction rapide, exacerbée par l'urbanisation. En Afrique subsaharienne, la disparition de ces zones a aggravé les épidémies de maladies hydriques telles que le choléra, affectant des millions de personnes chaque année.

Une nouvelle direction pour les objectifs de développement durable

Nous plaidons pour que les discussions climatiques incluent des initiatives concrètes pour évaluer et améliorer la santé des écosystèmes. Repositionner la "Santé de la Planète" comme un pilier central des ODD permettrait de créer des synergies entre les enjeux environnementaux et sanitaires.

Par exemple :

  • Inclure des objectifs sur la restauration des sols dégradés dans les rapports annuels de santé publique.
  • Encourager la transition vers une agriculture régénératrice, qui renforce la biodiversité et améliore la santé des sols.
  • Élaborer des politiques nationales pour réduire la pollution industrielle, avec des bénéfices immédiats pour la santé humaine et environnementale.

Ce parallèle entre la santé humaine et la santé environnementale rappelle une vérité fondamentale : tout comme un corps malade affecte l’esprit, une planète malade affecte ses habitants.

La COP 29 représente une opportunité cruciale pour intégrer cette vision dans les négociations climatiques. En reconnaissant que la préservation de la santé des écosystèmes est un acte de prévention pour les générations futures, nous pouvons transformer nos engagements en actions concrètes.

La "Santé de la Planète" n'est pas une utopie, mais une nécessité. Soigner la Terre, c’est soigner l’humanité.

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Nabil Felah


Pollution et solutions durables

Nabil Felah


Conseiller Senior en communication, gouvernance et stratégie. Expert dans le positionnement des dirigeants politiques Directeur fondateur d’un Cabinet Conseil en Stratégie «Sens Critic Strategic Circle» à Paris et à Bruxelles. Spécialiste des interventions en mode de crise Professeur grandes écoles en Stratégie.

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